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De l'Histoire et de la géographie sans limite !

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chroniques historiques et géographiques pour attiser sa curiosité, comprendre l'actualité et se faire plaisir !!


Génocide vendéen, crevons l'abcès !!

Publié par Nico HistoireGéo sur 16 Août 2015, 22:20pm

Génocide vendéen, crevons l'abcès !!

C'est un des tabous de notre histoire. C'est une question très épineuse sur laquelle des historiens se sont opposés avec violence. Ce qu'il s'est passé en Vendée pendant la Révolution doit être enfin clarifié.

L'historiographie dominante nous impose de penser la Vendée comme une simple rébellion matée, certes avec violence mais au nom du salut commun de la République balbutiante. Cette école a pignon sur rue dans nombre d'universités, Nantes, Angers, Paris etc...Ses parutions sont nombreuses, prolifiques. 

Ce qu'il s'est passé en Vendée pourtant ne devrait susciter aucune contestation possible. Un témoin privilégié des événements, Gracchus Babeuf a été chargé d'enquêter sur Carrier et ses crimes. L'auteur du Manifeste des Egaux a donné pour titre à ce rapport : du système de dépopulation ou La vie et les crimes de Carrier. Il serait intéressant que les historiens opposés à toute idée de "génocide" en Vendée Militaire viennent nous donner une définition de "dépopulation".

Mais, pour l'historiographie dominante qui ne veulent rien voir de contraire à une certaine idéologie, c'est encore trop peu. En soi, des militaires zélés pourraient dépeupler par des massacres désorganisés une contrée. Encore que, notre témoin, Babeuf, évoque l'idée de "système de dépopulation" et donc d'une organisation, d'un plan chargé de dépeupler. Mais lisons encore un peu plus Babeuf. "Boissy d'Anglas parut à la tribune et fit adopter son code populicide". Ici, nous avons la preuve irréfutable d'une action d'extermination voulue par l'Etat, par la tête de l'Etat français, par les députés de la Convention. Le mot de "code" renvoie à un vocabulaire juridique. Le droit français d'alors prône la dépopulation d'une partie ciblée, définie de son territoire.

En 1944, le professeur Lemkin invente le néologisme de "génocide" pour caractériser les crimes commis par les nazis. L'article 2 de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide adoptée par l'assemblée générale de l'ONU le 9 décembre 1948 stipule qu'un génocide est l'intention d'éliminer tout ou en partie un groupe national, ethnique, racial ou religieux par les moyens suivants :

- meurtre de membres du groupe défini

- atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale de membres du groupe défini

- soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle

- mesures à entraver les naissances au sein du groupe

- transferts forcés d'enfants du groupe à un autre groupe.

Ce texte a été confirmé en 1998 par la cour pénale internationale.

Nous avons une définition claire, précise. Une grille d'analyse. Maintenant, le travail de l'historien est de rédiger cette grille en trouvant ce qui dans les archives permet d'établir si la Vendée fut victime d'un génocide ou non. Ces archives sont consultables dans bien des travaux d'historiens. Regardons chacun des critères.

Quel groupe est défini ? Un territoire à cheval sur 4 départements: la Vendée, les Deux Sèvres, la Loire Atlantique et le Maine et Loire. Ce territoire est appelé "Vendée vengée". Ses habitants sont désignés par le mot "brigands". On parle de "race infernale". La Convention donne l'ordre, selon ses mots, de "régénérer l'humanité".

La Vendée peut être difficilement considérée comme un groupe national à part entière. Elle est désignée comme un groupe politique dissident, ayant manifesté sa ferveur et son soutien à la monarchie de Louis Capet, guillotiné à la suite d'une parodie de justice le 21 janvier 1793. En manifestant son adhésion à la monarchie, les vendéens rompent ipso facto le contrat social de l'état révolutionnaire. Les vendéens ne sont plus considérés comme des citoyens à part entière mais comme une minorité qui vient de se mettre à l'extérieure volontairement (et qui plus est serait en contacts avec l'étranger). Les vendéens ne sont plus citoyens mais ils ne sont pas apatrides non plus. Mais ce n'est pas suffisant. Au nom des frontières naturelles de la France définie par Danton, la Vendée est une tumeur cancéreuse. Elle est au sein du territoire national, aux contacts des autres populations à républicaniser, cette tumeur cancéreuse pourrait s'étendre et se propager. Et là il y a danger. Les grands moyens sont à employer.

Un groupe ethnique et racial ? Non, il n'y a pas d'éléments suffisants pour l'affirmer. Il y a une animalisation du vendéen, à la fois dans la manière de le désigner et dans la manière de le traiter une fois sur les théâtres d'opération. Mais, le darwinisme n'est pas encore né, il n'y a pas de caractéristiques raciales définies supposées propres au vendéen lambda. Le mot ethnie est apparu en 1886 en France. Il désigne un groupe humain qui possède une structure familiale, économique, sociale homogène et dont l'unité repose sur une communauté de langue, de culture et de conscience de groupe. Nous n'en sommes pas loin dans le cas de la Vendée. Les vendéens vivent dans une structure familiale paysanne. La structure économique et sociale repose sur une communion entre les 3 ordres. Nobles, clercs et paysans vivent dans le même monde, connaissent les mêmes difficultés. La bourgeoisie n'a pas beaucoup d'emprises, exceptions aux Sable d'Olonne très important port de pêche à l'époque et Fontenay le Comte. Le patois vendéen possède de nombreuses variantes au sein de la Vendée Militaire. Ce groupe a une véritable conscience de lui même. Il est soudé en raison de son organisation en villages et métairies. La cohésion sociale est  forte. La culture vendéenne est une culture catholique fervente imprégnée de l'autorité naturelle du père de famille. Il y a de nombreuses traditions et coutumes particulières et propres. L'extermination n'a pas pour objectif de s'en prendre à ces coutumes. Par contre, la structure catholique fervente et l'autorité du père de famille, les convictions royalistes sont de véritables motifs pour la dépopulation.

Un groupe religieux ? C'est le critère le plus flagrant. La Vendée désignée est un territoire qui correspond à l'aire de rayonnement et d'évangélisation de Saint Louis Marie Grignon de Montfort. La Vendée a connu un souffle d'évangélisation au XVIIe et début XVIIIe siècle sous l'action de Montfort. Sa tombe à Saint Laurent Sur Sèvre est devenue un lieu de pèlerinage important. Les vendéens sont, depuis, animés par une foi fervente qui se manifeste sans cesse dans la vie quotidienne. Tout ce que déteste et haie l'Etat révolutionnaire.

Quels moyens ?

- meurtres de membres du groupe défini ? En masse et par tous les moyens possibles et inimaginables. Madame de Sapinaud affirme, après le passage d'une colonne infernale : "ils tuèrent, massacrèrent, violèrent, brûlèrent. Il n'y a point de crimes qu'ils ne commirent ce jour là. Ils achevèrent les pauvres blessés".

- atteintes graves à l'intégrité physique ou mentale de membres du groupe défini. Reprenons le témoignage de Mme de Sapinaud. Elle décrit "Chez ces pauvres demoiselles Vexiau, ils les avaient massacrées, et leurs deux servantes. Ils avaient guéié leur corps comme un gueie du lin. Des lambeaux de chair étaient tout autour de la chambre, le long des murs. Il y avait deux pauvres filles, ils les avaient coupées par morceaux". Ce n'est qu'un témoignage parmi des centaines des milliers d'assassinats commis. Les 200 000 Vendéens exterminés l'ont tous été dans pareilles conditions : femmes, enfants, vieillards. Les hommes, eux, furent en grande partie décimés pendant la guerre militaire, entre armées catholiques et royales et armées de la République lors de la Virée de Galerne.

- Soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle. Tribunaux révolutionnaires, loi des Suspects, Grande Terreur, lois d'extermination de la Vendée. Aucun vendéen ne peut échapper vivant aux lois révolutionnaires votées. Des plans sont établis pour utiliser du gaz, empoisonner les puits avec de l'arsenic, ne livrer que de la nourriture empoisonnée. Plus concrètement, les colonnes infernales ont pour ordre et vont faire appliquer la politique du brasier. TOUT doit être brûlé : forêts, maisons et chaumières, châteaux et logis, champs de labours, champs de pâtures et champs de jachère. Il faut faire de la Vendée un exemple de répression. Il faut faire de la Vendée un cimetière et une terre totalement désinhibée par le feu. Il faut régénérer l'humanité, créer une terre totalement neuve.

- mesures à entraver les naissances au sein du groupe. En tuant les femmes en priorité, en éventrant les femmes enceintes systématiquement, en assassinant sans gènes les enfants, dans les intentions de la Convention, la Vendée doit être véritablement purgée.

- transferts d'enfants vers un autre groupe. La Révolution va faire pire ! Elle fait faire un mémoricide. Elle va parvenir à rendre coupable la victime. Elle invente le mythe de Barra, enfant républicain qui aurait été assassiné par des royalistes, mensonge odieux. Elle élimine Carrier, acteur et donc témoin trop embarrassant une fois sa tâche réalisée. Elle glorifie Tureau et ses généraux génocidaires, érigés au rang de héros de la nation. Les plaies de la Vendée sont purulentes, les survivants savent mais sont réduits au silence. Les descendants vivent avec des questions sans réponse, l'école des Hussards leur apprend que le sort réservé à la Vendée fut mérité, si tenté qu'il y ait eu quelque chose. Les travaux des historiens sont parasités par l'idéologie dominante. Pire que des transferts d'enfants, il y a des transferts de conscience et de mémoire. Et les historiens qui continuent à nier ce qu'il s'est passé, si brillants et compétents soient ils, continuent l'oeuvre de mémoricide en cours et se retrouve donc complices du crime.

A cela, on peut ajouter aussi des déportations vers des lieux de détention et d'extermination comme les anciens entrepôts à café de Nantes transformé lieu de parcage pour vendéen. 240g de riz par jour pour nourriture. La mort était la seule porte de sortie. D'autres déportations ont eu lieu à Angers et à Noirmoutier. Le territoire est quadrillé afin de ne laisser personne s'en réchapper. A La Rochelle, une justice extrêmement rude et intransigeante est mis en place. A Angers c'est Francastel, à Nantes c'est Carrier. La tenaille est créée, Tureau n'a plus qu'à agir de l'intérieur.

Maintenant, reste à définir le rôle de l'Etat. Si l'Etat n'en n'a joué aucun, l'idée de génocide tombe à l'eau car il s'agit d'un crime politique. Les génocides sont aussi des crimes démocratiques. Dans le cas de la Shoah, de la Vendée, c'est le peuple souverain ou une partie agissante qui élit le personnel du pouvoir. Hitler fut élu par le peuple allemand, son "Mein Kampf" qui résume sa pensée était connu tout comme son contenu. Si aucun député ne fut élu sur la base de manifestes appelant à l'épuration d'une partie de la population, une grande partie le sont pour leurs idées extrémistes. Ces extrémistes sont appelés "La Montagne" et dans un Paris en pleine ébullition, la surenchère au fanatisme est permanente. La peur aussi a pu conduire le peuple ou tout du moins sa minorité agissante à voter pour de pareils personnages.

Le génocide vendéen fut ordonné, voulu, pensé par l'Etat français. Il faut insisté sur un fait : l'armée catholique et royale est totalement défaite et anéantie à Savenay. La Vendée ne représente plus aucun danger pour la sûreté de l'Etat. Dans son repli de la Virée de Galerne, les armées républicaines sont parvenues à purger le danger. Elles n'ont fait que très peu de prisonniers. Au Mans, les récentes découvertes archéologiques ont permis de déterrer des fosses communes. Dans celles ci, des crânes de vieillards et d'enfants sont fendus au sabre, montrant la rudesse extrême de la répression.

Le génocide vendéen se produit, lui après cette défaite militaire sur des populations de femmes, de vieillards et d'enfants inoffensifs. S'en prendre à pareille population est significatif d'intentions génocidaires : il ne faut pas de descendance aux brigands de la Vendée.

Concrètement, cette volonté politique se manifeste à la fois dans les débats à la Convention où les discours violents et impitoyables se surenchérissent comme le célèbre discours "Détruisez la Vendée" de Barère . Les organes dirigeants, c'est à dire le Comité de Salut Public et le Comité de sûreté générale agissent et prennent des décisions. Le décret du 1er août 1793 établit par la Convention fixe en 14 articles les mesures d'intervention contre  "les rebelles de la Vendée". Il affirme : "les forêts seront abattues. Les repères des rebelles seront détruits. Les femmes, les enfants et les vieillards seront conduits à l'intérieur". Pareilles mesures radicales prises par la République séparent la population en 2 groupes : femmes, enfants et vieillards qui doivent être déportés / le reste de la population qui doit être anéantie.

Carnot, ministre de la guerre du Comité de Salut Public dépêche l'armée de Mayence sur le terrain pour faire appliquer ce décret de loi : 16 000 soldats disciplinés.

Le 1er Octobre, un nouveau décret pris par la Convention ordonne : "il faut que les brigands de la Vendée soient exterminés avant la fin du mois d'octobre". Les brigands...Un brigand est un criminel. La logique politique de la Convention est de rendre criminel ses opposants. Ce que fera plus tard avec beaucoup de talent Lénine, Staline, Mao etc....

Ces lois du 1er août et du 1er octobre 1793 ne sont toujours pas abrogées aujourd'hui....

Un arrêté du 11 novembre 1793 affirme : " Le comité de salut public a arrêté un plan général tel que les brigands doivent disparaître en peu de temps". Lettre du 12 décembre à Turreau : "Les brigands que vous allez combattre ont été défait plusieurs fois. C'est à vous qu'est réservé la gloire d'achever de les exterminer".

Le Représentant de la Convention, Joseph Pierre Fayau désire tout détruire en Vendée, rendre le sol stérile afin que rien ne puisse repousser. Un autre camarade, Lequinio, se rend à Fontenay Le Comte et assassine de sa main un détenu. Il donne alors l'ordre de ne plus faire de prisonniers et de purger toutes les prisons.

Ils nomment Carrier le 8 novembre qui installe son QG à l'église Sainte Croix de Nantes.Convoitant leurs fortunes, il fait enfermer les riches commerçants nantais. Sa guillotine tranchera les têtes de milliers d'enfants, femmes et vieillards. Les entrepôts à cafés sont transformés en camps de concentrations pour vendéens.Les autres sont conduits aux carrières de Gigant pour y être fusillés. On fusille entre 50 et 200 personnes par jour dans ces carrières. Dans la nuit du 16 au 17 novembre 1793, Carrier fait noyer dans la Loire 94 prêtres réfractaires. Cela donnera lieu à une pratique qui se généralisera et qui portera le nom de code de "baptême républicain". Femmes et enfants seront tous méthodiquement détroussées avant d'être noyés dans des conditions effroyables. Le 17 novembre 1793, Carrier se justifie et se vante auprès de la Convention avec cette phrase restée dans l'Histoire "Quel torrent révolutionnaire que la Loire !". Entre novembre 1793 et février 1794, entre 6000 et 10 000 vendéens périssent ainsi par noyade sur l'ordre de Carrier.

Francastel aura la même mission que Carrier à Angers et Turreau aura pour mission de purger la Vendée de l'intérieur. Tous les jours, les généraux doivent rendre compte de leurs actions. Turreau, conscient de la gravité des crimes qu'il commet demande que le Comité lui donne non plus son autorisation orale mais des ordres écrits pour pouvoir se dédouaner si sa tête est menacée. Réponse du ministre de la guerre : tu nous a demandé de valider ton projet, tes intentions nous paraissent bonnes, en attente de résultats concrets. Dans cette même réponse du 6 février 1794, le ministre ordonne "extermine les brigands jusqu'au dernier, voilà ton devoir". Plusieurs lettres des comités demandent à Turreau de faire son travail, d'appliquer sa mission. Robespierre est tenu au courant presque tous les jours de ce qu'il se passe, signe les lettres de réponses. Ce génocide par lettres est nommé "génocide par petits bouts de papier".

Hélas, de nos jours, ces recherches pour faire éclore la vérité sont parasitées. On voit bien comment sont tournés en ridicule les palabres liés aux ossements du Mans. Dans ce débat, qui aurait dû faire resurgir la Mémoire Vendéenne toujours présente, qui aurait dû intéresser les historiens français et étrangers sur le sens de ces cadavres dont les blessures montrent l'inhumanité des assaillants républicains. Mais, il n'en n'est rien. On se querelle, on s'invective sur un lieu pour des motifs davantage économiques que historiques, comme le commerce des reliques au Moyen Age. D'autres historiens détournent les débats sur la Vendée autour d'un prétendu "Pardon". Si le chef Vendéen, Bonchamps, a bien gracié les prisonniers républicains qu'il détenait, à aucun moment il n'est question de pardonner et donc finalement de légitimer sans le dire les crimes commis en Vendée. Un Pardon suppose aussi un acte d'excuse, ou, tout du moins, une prise de conscience des crimes qui ont été commis. Merlin de Thionville dira à la suite de Bonchamps "les Brigands n'ont pas le temps d'écrire, cela s'oubliera comme tant d'autres choses". Pire encore, les députés et les sénateurs ont refusé d'abroger en 2007 et en 2012 les décrets d'extermination de la Vendée toujours valables aujourd'hui.

Les contradictions sont nombreuses aujourd'hui. On porte en triomphe, à juste titre, les martyrs de Charlie Hebdo, exterminés par des terroristes pour avoir continué à dénoncer librement l'intégrisme religieux. Mais, l'extermination des Vendéens qui, au nom des Libertés millénaires d'Ancien Régime, de la liberté de conscience et de croire s'étaient soulevé, elle, ferait tâche. Nous sommes confrontés à 2 excès :

* le premier, celui d'oublier volontairement près de 200 000 vendéens exterminés, génocidés, femmes, enfants, vieillards, gisant encore dans les charniers du crime et de l'impunité.

* le deuxième, celui de voir dans le sacrifice des vendéens, une possibilité de reliques et de développement économique. Ignoble procédé lui aussi.

 

 

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